Levens, 06670
Bienvenue à Levens, commune française de 3700 habitants située dans le département Alpes-Maritimes et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.Vous trouverez ici quelques infos sur la commune et notre sélection de sites sur Levens.
     
 
 

Levens en bref

Département : Alpes-Maritimes
Code postal : 06670
Population : 3700 habitants
Région : Provence-Alpes-Côte d'Azur
Arrondissement : Nice
Canton : Levens

Histoire de Levens

Antiquité
Les premiers habitants mentionnés par l'histoire sont les Lépontiens, une des nombreuses tribus ligures. Le nom de Léponti devient Leventi sous les Romains, puis Leventio au Moyen Âge, Levenzo pendant la séquence italienne, pour devenir l'actuel Levens.
Avant le peuplement par les Léponti, qui occupent la vallée médiane du Var et la haute vallée du Paillon, et fondent également Lucéram, d'autres clans ont vraisemblablement vécu sur ce site : des ossements humains, des restes de foyers, des fragments de poteries néolithiques ont été mis au jour dans la grotte du Rat, découverte en 1913 par l'instituteur du village Henri Sivade et réétudiée en 1971 par Roger Cheveneau [11] ; des enceintes fortifiées de l'âge du fer sont visibles à l'est sur le Castellar, le Véaou, et en divers points de la chaîne du Férion. Au sud sur la Fubia, le Camp Pestier et le Castelvieil, ainsi que sur le site même de l'actuel village (oppidum) [12].
Trophée des Alpes à La Turbie
Les Romains mettent 160 ans pour soumettre définitivement les tribus ligures de la région. En 13 avant notre ère, l'empereur Auguste crée la province romaine des Alpes-Maritimes, dont le chef-lieu est Cemenelum sur l'actuelle colline niçoise de Cimiez, et en 6 avant notre ère il élève son Trophée des Alpes à La Turbie pour commémorer cette conquête. Les Romains choisissent le quartier des Prés pour s'établir à Levens et y fondent une importante agglomération, où aurait séjourné la princesse Cornélie Salonine, épouse de l'empereur Galien, lors d'un voyage aux sources thermales de Berthemont-les-Bains [13]. Ils construisent la voie muletière pavée qui va de Cemenelum à Saint-Martin-Lantosque (actuel Saint Martin Vésubie) en passant par Levens et rejoignant la Vésubie au cros d'Utelle. Le vestige romain le plus important est une inscription sur une pierre en provenance d'un ancien monument élevé par une veuve à la mémoire de son mari et de son fils [14], visible au chevet de l'ancienne église Notre-Dame-des-Prés connue sous le nom de la Madone [15].
Moyen-Âge
La Pax Romana dure quatre siècles, puis l'Empire romain s'effondre et les peuplades barbares déferlent en vagues successives [16] : Burgondes, Quades, Alains, Vandales (en 407), Wisigoths (qui détruisent Nice et Cemenelum en 415), puis les Huns d'Odoacre (qui créent un royaume en Méditerranée de 491 à 507), remplacés par les Ostrogoths jusqu'en 539, avant de laisser la région aux Francs. Levens souffre de l'invasion des Saxons, puis des Lombards, qui détruisent de nombreuses villes de la région et démantèlent en partie le trophée d'Auguste autour des années 580 avant d'être repoussée par Childebert II [16],[17].
Les Sarrasins débarquent dans le golfe de Saint-Tropez en 884 et s'y installent dans leur forteresse du Fraxinetum (à La Garde-Freinet dans le département du Var) pour presque un siècle de razzias et de pillages jusqu'aux vallées alpines. Ils ne sont définitivement expulsés de la région qu'après la bataille de Tourtour en 973, au cours de laquelle les guerriers provençaux des seigneurs de Levens, d’Aspremont, de Gilette, de Beuil et de la ville de Sospel, sous le commandement du comte Guillaume Ier de Provence, prennent d'assaut la place forte sarrasine du Fraxinet [18],[19]. Les raids de pirates barbaresques continueront cependant de toucher le comté de Nice jusqu'au début du XIXe siècle, comme en témoigne un tableau ex-voto de 1816 conservé au sanctuaire de Notre-Dame de Laghet [20].
Le village actuel est bâti autour de l'ancien château féodal élevé vers l'an 900 par les comtes de Provence. La première église de Levens se trouve à Notre-Dame-des-Prés. Le Chartrier de l'Abbaye de Saint Pons hors les murs [21] indique que ce prieuré existe déjà en 1075 lors de sa restitution par la famille seigneuriale de Nice à l'abbaye de Saint-Pons, qui le conserve jusqu'à la Révolution. Quelques années plus tard, le monastère de Saint-Pons devient le possesseur du fief de Levens, qu'il garde plus de 150 ans [22].
Les chevaliers de l'ordre du Temple établissent leur commanderie à Notre-Dame-des-Prés, après l'accord vers 1135 entre le pape et l'empereur d'Allemagne, alors suzerain de la Provence. La crypte de cette commanderie templière témoigne de sa prospérité. Dans la cour existe encore l'auge en pierre percée d'un trou qui servait de mesure aux céréales de la dîme. Soldats et bâtisseurs, ils élèvent près du sommet du mont Férion, à la place d'un autel au dieu Mars, une chapelle dédiée à l'archange Saint-Michel et dotée d'un campanile avec une cloche pour alerter les populations des vallées de Levens et de Contes en cas d'incursion sarrasine [23]. Charles II d'Anjou fait arrêter tous les templiers du comté de Nice en 1307, en vertu d'ordres reçus du roi de France Philippe le Bel, et leurs biens sont confisqués. Notre-Dame des Prés reste longtemps une source de différends entre les abbés de Saint-Pons et les prieurs de l'église paroissiale Saint-Antonin [24].
A partir de 1112, Levens et la Provence sont sous la dépendance des comtes de Catalogne après la mariage de Raimond-Bérenger III de Barcelone avec Douce de Provence, l'héritière des comtes de Provence. Puis ils passent sous la coupe des capétiens d'Anjou lors du mariage de Béatrice de Provence avec Charles Ier d'Anjou en 1246.
Dynastie des Grimaldi
Porte de l'ancien château-fort.
Porte médiévale des remparts.
Sur l'ordre de Charles Ier d'Anjou, et afin de mettre fin à des querelles interminables, il est procédé le 23 octobre 1251 à la délimitation des fiefs Levens et de Saint Blaise, qui restera valable 300 ans jusqu'au nouveau bornage du 8 juin 1567 [25]. Les frères Jean et Anselme de la famille Riquier d'Eze sont attestés comme seigneurs de Levens en 1272 [26]. Les Riquier conservent ce titre jusqu'au 15 janvier 1385, lorsque Hugues Riquier est accusé de rébellion envers le souverain et dépossédé de ses biens[27], qui sont transmis aux Grimaldi de Beuil le 20 juin 1420 par le duc Amédée VIII de Savoie [28].
Le premier des membres de la famille Grimaldi portant le titre de « seigneur de Levens » [29] est Jean Grimaldi, baron de Beuil et sénéchal de Provence, qui se marie en 1381 avec Bigotte Grimaldi et meurt en 1445. Son fils Pierre lui succède comme baron de Beuil et se marie en 1442 avec Marguerite de Castellane. Puis c'est au tour du fils cadet de Pierre, Louis, qui porte les titres de seigneur de Levens, de Remplas et de Tourette-Revest et se marie avec Marguerite de Bracas. Il est la « tige » des Grimaldi de Levens, qui s'éteignent en 1841 avec César Grimaldi [28]. Ces titres sont repris par Jean Ier, marié en 1504 avec Marguerite de Forbin. La succession est assurée par Jean II , né en 1512, marié en 1550 avec Françoise de la Baume et mort en 1603, qui porte les titres de seigneur de Levens, de Remplas et de Tourette-Revest en 1543, coseigneur de la Roquette en 1550. Vient ensuite César, seigneur de Levens, de Remplas et de Tourette-Revest, coseigneur de la Roquette en 1603, marié en 1582 avec Philippa de Grasse-Cabris et mort en 1627. Pour doter ses enfants, il vend en 1611 le fief de Tourette-Revest à son cousin Annibal [30]. Il est chassé par les Levensois en 1621 et après lui le titre n'est plus qu'honorifique, car Levens est « comtesse d'elle-même ». Son successeur est Honoré, seigneur de Levens et de Remplas, coseigneur de la Roquette, marié en 1626 avec Suzanne de la Gousse de la Baume. Puis vient Philippe-Emmanuel, marié en 1660 avec Dorothée Bonfiglio et élu premier consul de Nice de 1682 à 1692, à qui Jean Ribotti essaye de revendre le fief de Levens dont il a fait l'acquisition. Le suivant est Honoré, baron de Sainte Agnès, comte de Remplas (érigé en comté en 1671), seigneur de Levens, marié en 1696 avec Victoire Léotardi. Puis Jean-Baptiste-Philippe porte les mêmes titres et se marie en 1726 avec Anne-Marie-Rose Caissotti. C'est enfin le tour de Jean-Baptiste-Joseph, baron de Sainte Agnès, comte de Remplas, qui perd le titre de baron de Sainte Agnès en 1766 et meurt célibataire en 1776. Tous ses biens passent à sa sœur et la Révolution française les fait disparaître des Alpes-Maritimes en s'emparant de leur propriétés. Les héritiers ultérieurs vendent en bloc ce qui reste à l'avocat Louis-Isidore Mari de Bendejun en 1827.
À la fin du XIVe siècle, la destinée de Levens est liée à celle de tout le comté de Nice qui se sépare de la Provence pour se dédier à la Savoie, sur l'initiative du puissant Jean Grimaldi, baron de Bueil et sénéchal de Provence. L'acte de dédition est signé le 28 septembre 1388, devant le monastère de Saint-Pons. À cette occasion, Levens, Lucéram et Utelle, réunis en confédération, déclarent refuser le serment d'hommage à Amédée VIII le Rouge, comte de Savoie, si on ne leur rendait pas les libertés et privilèges concédés à prix d'argent par la reine Jeanne [31].
Un événement très important pour toute la vallée de la Vésubie est la construction, à partir de 1433, de la route muletière de Nice à Vinadio, par Levens, Utelle, Lantosque, Saint-Martin et la chaîne de montagnes qui aboutit aux vallées de Coni. Moyennant le droit de péage à son profit, Paganino Del Pozzo, riche patricien niçois et fermier de la gabelle, offre d'ouvrir à ses frais cette route nouvelle pour le transport du sel, dont l'exploitation est à l'époque une branche considérable du commerce niçois [32]. La route « Paganine » favorise largement les relations commerciales des Levensois et reste la principale route entre Nice et Turin jusqu'à l'acquisition du comté de Tende avec son col par le duché de Savoie en 1581 [33].
L'épidémie de peste de 1467 ravage une grande partie du comté, qui perd un tiers de sa population lors de la première vague de « mort noire » [34].
Lors de son investiture comme seigneur de Levens le 8 janvier 1475, Louis Grimaldi accorde aux habitants une charte "de liberté" leur conférant le droit de nommer eux-mêmes leurs conseillers et leurs maires (sindaci) et la disparition de la taille seigneuriale moyennant une redevance annuelle de 40 florins d'or à payer aux Grimaldi le jour de la Toussaint [35]. Par une autre charte du 5 juin 1479, il abandonne ses droits de banalité sur les pâturages, les terres non cultivées, les moulins à huile et à farine ainsi que sur les fours à pain, contre une pension viagère de 24 florins d'or réversible à ses successeurs [36]. Ces deux chartes en latin sont les plus anciens documents possédés par les archives municipales.
Son successeur Jean Ier ne laisse pas le même souvenir. Le gouvernement de Savoie, alerté sur ses turpitudes, diligente une commission d'enquête qui ne relève pas moins que 232 chefs d'accusation, parmi lesquels le crime de lèse-majesté, les mauvais traitements exercés envers les Levensois et l'atteinte à l'honneur et à la vie de personnes sans reproches. Jean Ier est condamné en 1508 au bannissement perpétuel avec confiscation de ses fiefs au profit de la couronne ducale. Il vit 7 ans en exil, tantôt à Paris et tantôt à Aix-en-Provence et obtient finalement, à la suite de l'intercession du pape Léon X, sa grâce et la restitution de tous ses fiefs contre le paiement d'une amende de 4 000 écus par lettres ducales du 25 avril 1515 [37]. Pour s'acquitter de cette dette, il remet au duc de Savoie le fief de Levens, dont le village est pillé et le vieux château détruit en 1527 par les troupes favorables à la France de René Grimaldi, seigneur du Val de Massoins, et de Jean-Baptiste Grimaldi, seigneur d'Ascros [38].
Jean II Grimaldi, investi du fief de Levens le 15 mai 1543, prête serment de fidélité à Emmanuel-Philibert, duc de Savoie, pour aussitôt le trahir et s'engager aux côtés des troupes franco-turques lors du siège de Nice. Convaincu de trahison, Jean II est condamné au bannissement et à la confiscation de ses biens. Les habitants de Leventio achètent, par acte du 22 octobre 1550, directement à leur suzerain savoyard, les moulins à farine et à huile (deficis) avec faculté d'en construire de nouveaux, moyennant la somme de 1 200 écus d'or d'Italie. Mais après 14 ans d'errance en France et son amende honorable lors de la bataille de Saint-Quentin, Jean II est restitué dans ses titres et propriétés, par acte du 8 décembre 1557, soulevant la colère des habitants et rendant, pour longtemps, les Grimaldi impopulaires [39]. Un accord est finalement trouvé le 3 mars 1586, validant celle de 1550 moyennant le versement d'une nouvelle indemnité de 2 000 écus d'or d'Italie [40].
Église paroissiale St Antonin.
L'église paroissiale, dont la première mention attestée remonte au 7 mars 1286 [41], reçoit des travaux grandioses entre 1610 et 1615 avec des tableaux des peintres de l'école de Gênes et la fonte de la cloche surnommée "la vieille campane", qui survécut à la Révolution [42]. Dans son ouvrage sur Levens, Garino donne la liste des curés des paroisses de Levens (Saint-Antonin), de Saint-Antoine-de-Siga (Saint-Antoine-de-Padoue) et de Plan-du-Var (Sainte-Anne) [43].
Annibal Grimaldi, comte de Beuil et gouverneur du comté de Nice, entretient des relations politiques avec le voisin français et complote, dès 1614, de donner le comté à la France. Charles-Emmanuel, duc de Savoie, retire alors à Annibal Grimaldi son commandement et lui ordonne de le suivre, avec son fils André, à la cour de Turin. Ceux-ci retournent dans leurs terres, et Charles-Emmanuel ne peut plus les considérer que comme rebelles. Ne pouvant compter sur l'appui du roi de France Louis XIII qui vient de marier sa sœur Christine avec Victor Amédée, le fils de Charles-Emmanuel, Annibal Grimaldi et son fils sont convaincus de lèse-majesté, de rébellion et de félonie, et condamnés par contumace à la peine capitale, à la suite d'un procès qui traîne en longueur. Le comte de Beuil s'enferme alors dans son château de Tourettes-Revest, qui est aussitôt assiégé par les troupes savoyardes. Il est étranglé le 9 janvier 1621 [44].
À l'époque de ces péripéties entre le suzerain et son vassal, le seigneur de Levens est César Grimaldi. Les habitants ont encore en mémoire le retour de Jean II, et la jeunesse n'oublie pas que le comte de Beuil est l'auteur des lettres interdisant toute réjouissance publique sans l'accord du seigneur [45]. En apprenant la fin d'Annibal, César et sa famille s'enfuient à Cabris, les Levensans se portent au château, le dévalisent, plantent le boutàu (la pierre sur laquelle on saute) et dansent la farandole en sautant dessus, en criant : « Nous sautons sur le ventre de Grimaldi ! » [46]. Dès le lendemain, le duc de Savoie accueille favorablement une adresse reçue des Levensans l'assurant leur dévouement à la Savoie. En retour, Charles-Emmanuel accorde une charte de liberté à Levens qui devient comtesse d'elle-même. Le 16 octobre 1622, ordre est donné de détruire les remparts défendant le château.
Royaume sarde, Révolution et Empire
Les finances du duché de Savoie étant catastrophiques à la fin du XVIIe siècle, le duc Victor-Amédée II dévalue la monnaie, augmente fortement les impôts et met en liquidation les communes insolvables. Les fiefs de villages émancipés depuis des siècles de leur tutelle seigneuriale sont vendus à de riches gentilshommes et à des bourgeois ainsi anoblis. C'est ainsi que Jean Ribotti (1689-1721), docteur en médecine et philosophie exerçant à l'Hôpital majeur de Turin, achète le 14 octobre 1699 pour la somme de 159 580 livres les lieux d'Isola, Venanson, Utelle, Breil, Saorge, Lantosque, Pigna, La Bollène, Saint-Sauveur, Contes, Levens et quatre villages de Val-de-Blore (La Bolline, La Roche, Saint-Dalmas et Mollières), dont il revend certains à des amis. Quand Jean Ribotti veut revendre le fief de Levens à l'héritier des anciens seigneurs Philippe-Emmanuel Grimaldi, les Levensois se révoltent et l'inféodation est annulée par lettres patentes du 14 juillet 1700, confirmant l'indépendance de Levens comme comtesse d'elle-même [47].
Au fil du temps, la vie quotidienne pastorale des Levensois s'améliore grandement, surtout après le traité d'Utrecht, qui donne la comté de Nice au royaume de Piémont-Sardaigne en 1713, et ce malgré les épidémies de peste en 1631 [48] et de « fièvre maligne » en 1738 [49], ainsi que les guerres de Trente Ans (1618-1638), de la Ligue d'Augsbourg (1689-1697) et surtout de Succession d'Autriche (1741-1748) lors l'occupation par les troupes franco-espagnoles (« gallispanes ») qui édifient des fortifications sur la ligne de front du Férion [50].
Deux documents importants rédigés à cette époque sont les « statuts champêtres et politiques de Levens » de 1751, qui organiseront la vie locale durant des siècles[51], et le rapport Joanini de 1752 évaluant l'état du comté exsangue après son retour au royaume de Sardaigne par le traité d'Aix-la-Chapelle[52]. Ce rapport montre que le bilan de Levens était excédentaire avec cependant une lourde dette d'environ 90 000 livres pour des biens estimés à 17 000 livres et des revenus de 4 000 livres.
Dès août 1789, le comté de Nice commence à recevoir un flot de réfugiés nobles et ecclésiastiques. Le 28 septembre 1792, les troupes du général Jacques-Bernard Modeste d'Anselme (1740-1814) traversent le Var sans déclaration de guerre et pénètrent le lendemain dans la ville de Nice. Le 17 octobre 1792, les 1 150 hommes du maréchal de camp Paul de Barral s'emparent de Levens, puis marchent vers Duranus et Lantosque. Le pillage de leurs biens provoque le soulèvement des Levensois qui attaquent et mettent en déroute les troupes françaises stationnant aux "grands prés" [53]. Le futur maréchal Masséna, né à Nice et élevé à Levens même dans ses maisons familiales de la Siga et du Serret, fait partie de cette troupe d'occupation et est chargé de pacifier ses compatriotes. Masséna mène à bien cette mission par la persuasion et la force en vainquant les troupes austro-sardes à la bataille du Brec d'Utelle les 24 et 25 novembre 1793.
La région devient en 1793 le 85e département français des Alpes-Maritimes après le vote de la population, et Levens est nommé chef-lieu de canton [54]. L'arrivée des révolutionnaires français entraîne une division entre deux grandes familles de Levens : les Gilletta, fidèles au roi de Piémont-Sardaigne, et les Goiran, qui prennent le parti de la France. L'occupation est marquée par la mauvaise conduite des troupes révolutionnaires qui "vivent sur l'habitant". Ces exactions sont vivement dénoncées par Victor Tiranty et par le rapport de l'Abbé Grégoire remis à la Convention nationale. Elles entraînent en retour un mouvement de résistance contre-révolutionnaire appelé « barbet », qui pratique le brigandage et harcèle les troupes françaises jusqu'à la chute de l'empereur Napoléon Ier en 1814 [55]. Les deux traités de Paris redonnent finalement la comté de Nice au Royaume de Piémont-Sardaigne et restaurent les frontières de 1760 [56].
Lors de la restauration sarde, le roi Victor-Emmanuel Ier de Sardaigne décide de ne pas exercer de représailles contre ceux qui ont servi le régime français, mais s'empresse de supprimer les institutions françaises et de rétablir celles d'avant 1792 : l'état civil retourne au clergé, les anciens poids et mesures sont de nouveau utilisés, l'italien redevient la langue officielle et les nominations remplacent les élections [57].
Au XIXe siècle, Levens connaît un développement spectaculaire : on bâtit, plante, irrigue, enseigne, etc.. En 1806 apparaissent des personnalités locales et le premier instituteur de l'école publique. En 1810 des journaux locaux (comme le Bulletin des lois et le Messager des Alpes) sont édités et lus par la bourgeoisie. À partir de 1829, on construit une voie carrossable de Nice à Saint Martin-Vésubie passant par Levens, assurant la prospérité du commerce local jusqu'à l'ouverture d'une nouvelle voie dans la vallée à la fin du XIXe siècle [58]. En 1844, des digues sont construites dans la vallée du Var. Cet endiguement permet l'accroissement de la superficie des terres agricoles, la construction de la route de Digne et du chemin de fer, ainsi que la fondation du hameau de Plan du Var [59].
Dès la fin de 1847 se dessine un mouvement favorable au rattachement de Nice à la France. Lors de l'entrevue de Plombières du 21 juillet 1858 entre Camillo Cavour et Napoléon III, une convention secrète est passée pour que la France aide à faire l'unité italienne en échange de la Savoie et du comté de Nice. Ce comté devient définitivement français le 24 mars 1860 quand Victor-Emmanuel II d'Italie signe le troisième traité de Turin, qui est ensuite validé par le référendum du 15 avril 1860 au cours duquel seuls les bulletins « oui » sont imprimés ! [60]. Sur 30 712 inscrits au "suffrage universel masculin" dans le comté de Nice, on dénombre 25 743 OUI, 4 779 abstentions, 160 NON et 30 bulletins nuls [61]. Les Levensois votent pour le rattachement à la France par 481 voix sur 487 votants [62].
Depuis 1860
École Saint-Roch, avec à droite le premier bâtiment du XIXe siècle.
Levens (en 1884), aquarelle d'Emmanuel Costa (1833-1921).
Levens dans les années 1960.
Après le rattachement du comté de Nice à la France en 1860, le gouvernement français soutient une vigoureuse politique de mise en valeur du pays (cadastrage des Alpes-maritimes [63], reboisement, voies de communication, adduction d'eau) et d'enseignement du français. Le 23 octobre 1860 arrive le premier instituteur laïc et français, M. Milon, alors que Mlle Tiranty, jeune Levensoise de bonne famille mais incapable d'enseigner en français, s'occupe de l'école des filles. L'école est alors payante, sauf pour les nécessiteux, et le tarif est fixé le 16 février 1862 à 0,50 F par élève et par mois [64]. Le 28 mai 1861, le conseil municipal vote la construction du groupe scolaire dans le quartier Saint Roch, alors que l'ancien château sert provisoirement d'école [65]. Il y a même des cours pour adultes et une bibliothèque municipale ouvre ses portes [66].
En 1879 commencent de grands travaux pour la construction au départ de la commune de Saint-Jean-la-Rivière du canal de la Vésubie apportant l'eau des montagnes à Levens et à Nice. En 1885, on décide la construction d'un lavoir couvert, ainsi que la création d'un poste de cantonnier communal [67], et en 1887 est décidée la construction du nouveau cimetière pour remplacer celui de l'église devenu trop exigu [68]. En 1892, le premier train passe par la gare de Plan-du-Var [69]. En 1897, on décide de planter les platanes le long de la route départementale au quartier des traverses et l'on pose une horloge sur le fronton de la chapelle des pénitents blancs [70].
Le développement se poursuit au début du XXe siècle : l'éclairage publique électrique arrive en 1904 [71], les premiers tramways électriques circulent à partir de 1908 et les moulins à huile commencent à fonctionner à l'électricité à partir de 1909. En 1911, on construit le pont suspendu de Saint-Blaise [72].
Au cours du XXe siècle, les forces vives du village s'épuisent peu à peu. Les cultures et le commerce traditionnels périclitent. D'anciens conflits resurgissent entre individus, familles et clans et les hommes politiques intriguent en pratiquant le clientélisme et le népotisme. La catastrophe de la Première Guerre mondiale éprouve durement le village, ainsi que l'émigration des jeunes abandonnant le village pour vivre et travailler à la grande ville.
Levens souffre peu de la Seconde Guerre mondiale jusqu'en 1944. Le 2 août 1944, un bombardement américain contre les ponts du Var et de la Vésubie rate sa cible mais frappe la quartier de la coopérative agricole, tuant 8 civils, en blessant 15 et en sinistrant 60 [73]. Le 15 août 1944, les alliés débarquent en Provence et Levens est libéré une première fois le 16 août par les F.T.P.. Mais une colonne allemande réoccupe Levens le 24 août et exerce des représailles : des résistants capturés sont torturés et exécutés et les hommes du village entre 18 et 60 ans sont enfermés trois jours dans la Chapelle Blanche comme otages. Un jeune soldat allemand blessé et soigné à l'hôpital de Levens intervient cependant en leur faveur auprès de ses supérieurs. Finalement, après quelques jours de combats, les troupes allemandes se retirent sans commettre d'autres exactions et Levens est définitivement libéré le 29 août. Un camp de prisonnier est installé aux « grands prés » en 1944-45 et les prisonniers allemands sont employés à des travaux forestiers [74].
À la fin de la guerre, la commune est pratiquement moribonde, et sa population vieillissante y est moins nombreuse qu'à la fin de XVIIIe siècle. Au début des années 1980, elle reprend cependant vie avec le développement des moyens de communication et de transport modernes qui permettent à de plus en plus de Niçois de travailler à la ville, tout en habitant à la campagne pour une meilleure qualité de vie.
source : Wikipedia

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